• Le monde vu par... une feuille
tempéra et huile sur toile
130 x 130 cm, 2018 •

         ÊTRE AU MONDE

J’ai découvert le travail Nora Douady il y a maintenant près d’une dizaine d’années à La Frette-sur-Seine lors d’une exposition dans une petite galerie, dont les fenêtres donnaient directement sur l’eau, les saules pleureurs et la lumière du ciel. Si je me permets d’évoquer ici ce souvenir personnel, c’est que je fus frappée, en regardant ses toiles, par la force de leur présence au monde. Nora Douady nous « donne à voir », pour reprendre le titre d’un recueil de Paul Eluard. Voir, c’est d’abord regarder, scruter l’infime et l’infini, jusqu’à ce que la réalité de l’arbre, de la feuille, du caillou ou de l’eau qui court acquière la puissance et le mystère du rêve.
L’émotion, devant un tableau, à la lecture d’un poème, ou à l’écoute d’une musique, naît souvent – presque toujours –d’une impression de « reconnaissance », d’une sensation indéfinissable non pas d’un .simple « déjà vu », mais plutôt d’un « déjà rêvé », en attente d’être révélé. Partant d’une observation obstinée du réel, Nora Douady cherche à en atteindre les couches les plus profondes, qu’il s’agisse d’une branche, d’une falaise, du vol d’une mouette ou du fragile miroitement de l’eau. Il me semble que Nora approuverait cette remarque de Valéry, qui prétend que regarder, « c’est oublier les noms des choses qu’on voit ». Oublier son nom et regarder la chose comme au premier jour de l’homme sur la terre, s’imprégner de sa forme, de sa couleur, de sa lumière, puis se fondre dans la matière, dans cet ocre, ce vert, ce bleu jetés sur la toile, jusqu’à ce que resurgissent, venu d’on ne sait où, le souvenir d’une émotion ou l’image floue d’un paysage oublié de l’enfance. Cézanne affirmait que peindre, c’était « réaliser des sensations ». Les toiles de Nora donnent parfois une impression d’apesanteur, comme si se recomposait sous nos yeux un univers onirique à partir de la réalité la plus sensorielle du caillou, de la brume ou de la transparence d’un ruisseau. C’est cette oscillation permanente qui fait toute la singularité de son travail, oscillation entre la précision de son observation du réel et son désir d’y échapper pour ne conserver, peut-être, que la sensation d’être au monde – au cœur même du vivant.
Béatrice COMMENGE 2018

• NASA
tempera et huile sur toile 
114 x 162 cm, 2018 •
• La source des rêves
tempera et huile sur toile 
130 x 162 cm, 2012 •
NORA DOUADY
née en 1964 à Paris
• 1990 Diplôme de l'Ecole des Beaux-Arts de Paris (atelier Cremonini)
• 1986 Maîtrise d'Histoire de l'Art.

Principales expositions personnelles
• 2018 - Galerie Felli, Paris
 2016 - Galerie du Pavé d'Orsay, Paris 
         - galerie Lfda, Nantes 
         - Hôtel de Ville, Lectoure
 2015 - Galerie Felli, Paris
         - Collégiale de Loudun
• 2013 - Galerie Felli, Paris 
• 2011 - Espace d'art contemporain Roger Ikor, La Frette-sur-Seine 
• 2010 - Galerie Felli, Paris 
• 2009 - Hôtel de Monthiers, ancienne maison Matisse, Pontoise 
• 2008 - Galerie des Beaux-Arts, Paris 
• 2007 - Musée des Dominicaines, Pont-l'Evêque 
• 2006 - Galerie Felli, Paris 
 2004 - Fondation Taylor, Paris 
• 2003 - Galerie Visconti, Paris 
• 2002 - Galerie Etienne de Causans, Paris 
• 2001 - Galerie Clément, Saint-Germain en Laye
• 2000 - Galerie des Beaux-Arts, Paris 
• 1999 - Galerie Etienne de Causans, Paris 
• 1997 - Galerie Philippe Frégnac, Paris

Principales expositions collectives
 2015 - Villa Daumier, Valmondois 
         - La Galerie, Auvers-sur-Oise
• 2009 - Musée Ingres, Montauban
• 2005 - Galeria Paloma, Berkeley
• 2004 - Salon de Mai, Paris
          - Foire de Strasbourg
• 2002 - Musée Tavet, Pontoise 
• 2001 - Iarca/Jo-Gi gallery, Chicago




• Bella Italia
tempera et huile sur toile
120 x 40 cm, 2016 •




Prix
• Prix Monique Corpet 2016, Fondation Taylor
• Prix André et Berthe Noufflard 2005, Fondation de France 
• Grand Prix Rugale Michaïlov 2005, Fondation Taylor 
• 2° prix de portrait Paul Louis Weiller 1999, Académie des Beaux-Arts de Paris

Bibliographie

• Marie C. AUBERT - "Nora Douady, choses de la nature, nature des choses", La gazette Drouot n°18, 8 mai 2015 
• Valérie AURIEL - "Dans le secret des arbres", Artistes magazine N° 127, mai-juin 2007 
• Laurent BENOIST - "Nora Douady, entrer en résonance avec le monde", Pratique des arts n° 129, 12/07-27/08 2016 
• Béatrice COMMENGE - "Etre au monde", catalogue galerie Felli mars 2018
• Leonardo CREMONINI, plaquette exposition Pont-l'Evêque et catalogue galerie Felli 2010 
• Emmanuel DAYDE - "Quand on aime la vie", catalogue A&C projets 2004 
• Daniel LACOMME - "La couleur dans le dessin et la peinture", 1994
- "L'espace dans le dessin et la peinture", 1995, ed. Bordas 
• Marc LE BOT , catalogue Jeune Peinture 1991 
• Daniel MAUROC (texte non publié)
• Annie SAUMONT - "Up and Down", 1991 
• Emmanuelle TENAILLEAU - "La nature sublimée", Pratique des Arts n° 77, dec. janv. 2008 
• Charlotte WALIGORA - "Nora Douady, les lumières de l'invisible", Arthebdomedias.com, 2010 et catalogue galerie Felli 2015
- "Labyrinthes", catalogue galerie Felli 2013










• Après la pluie
tempera et huile sur toile
130 x 97 cm, 2010 •

• Les oiseaux.
tempera et huile sur toile
114 x 162 cm, 2014 •
• Le monde vu par...un caillou moussu
tempera et huile sur toile
150 x 50 cm, 2017 •





















Leonardo CREMONINI , 2007

"Pour Nora Douady, pour son regard émerveillé et analytique, les branches tendues dans le feuillage, les crevasses humides dans la pierre ou la terre, 
sont les labyrinthe du rêve, où l'existence n'est pas décrite, mais vécue entre le dur et le tendre, 
par la caresse tâtonnante de la découverte. 
La quête du visible, aussi intense que celle du hasard et de ses taches, lui permet de rendre de plus en plus émerveillée notre perception du monde dans l'interrogation irrationnelle plutôt que dans sa mémoire. 
Une sensibilité très évocatrice qui élimine les préjugés qui séparent le microcosme du macrocosme pour nous rendre une pure "corporéïté" du rêve".
• Le monde vu par... un nuage
tempera et huile sur toile
130 x 97 cm, 2017 •
• Plonger
tempera et huile sur papier
24 x 32 cm, 2017 •
• Marée basse
tempera et huile sur toile
130 x 130 cm, 2007 •
• La rivière au lierre
tempera et huile sur carton
27 x 22 cm, 2016 •
Paysage sous-marin
tempera et encre sur papier
22,3 x 33,3 cm, 2015 •
• Le monde vu par... une libellule
tempera et huile sur toile
116 x 81 cm, 2017 •
• Au bord du désert
tempera et huile sur carton
15 x 10,6 cm, 2016 •
• Canyon
tempera et huile sur toile
97 x 163 cm, 2012 •
• L'ange entrevu
tempera sur carton
23,3 x 14,4 cm, 2018 •


IN TOUCH WITH THE LIVING WORLD

I first saw Nora Douady’s work nearly ten years ago in the village of La Frette-sur-Seine, at a show in a small local gallery where the windows look directly on to the river, 
the weeping willows, and the light in the sky. I mention this personal note because, while looking at her paintings, I was struck by the force of their real-life presence. 
Nora Douady “gives us sight,” to borrow the title of one of Paul Éluard’s books of poetry, in that she both invites us and empowers us to see—to join in scrutinizing the infinitesimal and the infinite, until the reality of a tree, leaf, pebble, or flowing water takes on the power and mystery of a dream.
The emotion we feel when looking at a painting, reading a poem or listening to music is often—indeed, almost always—triggered by the feeling of “recognition,” an undefinable sensation not of a mere déja vu but rather of a déjà rêvé, of something “already dreamed” that awaits revelation. Starting from an active observation of reality, Nora Douady seeks to reach its deepest layers—whether she is focused on the branch of a tree, a cliff, a seagull in flight, or shimmering reflections on water. Nora would likely approve Paul Valéry’s claim that looking means “forgetting the names of the things one sees.” This involves forgetting names and looking at a thing as one would on Man’s first day on Earth, absorbing its shape, color, and light, then merging with the material, with the ochre, green, and blue cast onto the canvas—until the resurgence, from somewhere unknown, of a recollected emotion or the blurred image of a forgotten childhood landscape. Cézanne stated that painting is “realizing one’s sensations.” Nora’s works sometimes suggest weightlessness, as if they were recomposing before our eyes a dream universe from the strongest sensory reality of a pebble, a fog, or the clear waters of a stream. The uniqueness of her work lies precisely in this never-ending to-and-fro—an oscillation between her minute observation of reality and her desire to escape from it, in order to preserve, perhaps, the pure sensation of being vitally in touch with the living world. 

Beatrice Commengé
• Conte philosophique.
tempera et huile sur toile
114 x 162 cm, 2015 •
• Les flaques
huile sur carton
19,5 x 25,5 cm, 2012 •
• Le ciel dans l'eau
tempera et huile sur toile
162 x 97 cm, 2015 •








Observé de près, le travail de Nora Douady résulte de toutes les façons d'appliquer et d'utiliser la peinture sur un même champ : projections, travail au pinceau, coulées, transparences, "tachisme" délicat. 
De ses fonds, aux apparences aquarellées, jaillissent ses lumières issues d'une application subtile de couleurs vives, attractives, réparties aux abords des zones de ciel qui traversent le tableau pour illuminer et modeler les végétaux. L'artiste nous confiait : "Je travaille sur la répulsion de l'huile et de l'eau qui créent naturellement des matières vivantes. (...)
(...) Lorsqu'elle imagine le paysage, la peinture se situe à la limite d'une "abstraction" fantastique qui se défait simultanément, car la vision proposée par la peintre combine deux efforts dont l'association relève d'un tour de force vertigineux : celui de la reproduction mimétique et celui d'un approfondissement microscopique ramené à la possibilité d'une vision à l'œil nu. Partant de ce que l'on voit naturellement ses cadrages seraient ceux de notre propre vue- elle ramène l'invisible et ce qui est de l'ordre de l'imperceptible, au visible. 
Tout, dans son travail de peintre, concourt à densifier et le sujet et la peinture comme une finalité poétique. C'est ainsi qu'en l'espace d'une toile, la nature prend corps et s'éveille, animée par des vents, quelques souffles qu'elle a le don de rendre palpables. 

Charlotte WALIGORA, 2010
• Neige et arbres
tempera et huile sur carton
20,5 x 30,3 cm, 2012 •
• La marnière
tempera et huile sur toile
 97 x 130 cm. 2003 •

• Bâtons dansant
tempera et huile sur carton
15 x 40 cm, 2003 •
• D'un horizon à l'autre
tempera et huile sur toile
 162 x 114 cm, 2012 •
• Le monde vu par... une abeille
tempera et huile sur carton
15,7 x 30,3 cm, 2018 •
• Le tronc
tempera et huile sur carton
32,5 x 25 cm, 2003 •
• L'échappée
tempera et huile sur toile
130 x 162 cm, 2009 •
"Il y a œuvre d'art, il y a œuvre de peinture, chaque fois que la pensée, chaque fois que l'œil ou l'oreille sont surpris par ce qu'ils voient, entendent ou lisent. 
On peint, on fait œuvre d'art parce qu'on désire cette surprise : au cours du travail langagier que vous faites, quelque chose vous arrive. 
Vous désiriez que ça arrive, mais vous ne saviez pas quoi. C'est pour en savoir quelque chose qu'on peint, qu'on fait œuvre d'art.
Et qu'on fréquente les choses de l'art.
Il se peut que cela vous saute aux yeux devant l'œuvre de très jeunes peintres. 
Pas toujours. Le plus souvent, il faut une longue patience pour que l'artiste y parvienne. D'ailleurs, tantôt ça vient, tantôt ça repart.
Parmi les peintures que j'ai vues de Nora Douady, certaines ont provoqué en moi cet effet de surprise heureuse. Ce sont celles où je peux parler de vertige. 
Le plus souvent ça se passe quant elle représente des cages d'escalier. 
Mais ça peut aussi vous saisir devant le portrait d'un homme allongé sur sa couche dont soudain le doute vous vient de savoir s'il est vivant ou mort.
Dans les images de Nora Douady, c'est affaire de peinture, non pas de mise en scène. Par exemple, les contours du visage et du corps de l'homme semblent par endroits s'effriter dans l'air. Par exemple, l'image est un recroisement incertain de teintes claires ou sombres avant qu'elle ne prenne forme pour vous d'un escalier.
Que demander de plus à une peinture que d'être, avant toutes choses, de la peinture ?"

Marc LE BOT, 1991

• Les aventures d'un œil
tempera et huile sur toile
162 x 130 cm, 2004 •